Et si Jean-Louis Voivy participait à la relance de l’industrie textile dans le Nord de la France… dépoussiérage du métier à tisser dans un laboratoire de recherche biomédicale.
Jean-Louis Viovy, chercheur émérite au Laboratoire physico-chimie Curie, vient de recevoir la confiance du Conseil européen de la recherche pour faire la « preuve de concept » de cette nouvelle technique.
Directeur de recherche émérite au Laboratoire Physico-Chimie du Centre de recherche (UMR 168 CNRS / Institut Curie), Jean-Louis Viovy a imaginé un tissu sur lequel les chercheurs pourraient tester de nombreuses combinaisons de traitements en parallèle, très rapidement et à moindre coût par rapport aux techniques actuelles. Après de premiers essais avec un petit métier à tisser artisanal au laboratoire, il s’est tourné vers l’École nationale supérieure des arts et industries textiles (Ensait) à Roubaix pour peaufiner ce tissu complexe, composé de plusieurs matériaux.
»L’épaisseur de ce textile est percée de microcanaux dans lesquels les chercheurs peuvent faire circuler des gouttelettes contenant quelques dizaines de cellules cancéreuses issues de patients. Ces petits amas de cellules sont alors cultivés jusqu’à ce qu’ils forment des « tumoroïdes » : des ébauches de tumeurs ne contenant que quelques milliers de cellules et mimant l’organisation tridimensionnelle d’une tumeur. On peut alors mettre chaque tumoroïde en présence d’une autre gouttelette contenant un traitement issue d’une large « librairie », pour déterminer les plus efficaces . »
explique le chercheur.
Jusqu’à présent, de telles études ne pouvaient se faire que sur des cellules en culture en deux dimensions, ce qui donnait des résultats peu fiables, ou sur des modèles animaux, ce qui est à la fois long, coûteux et mérite, éthiquement, qu’on cherche des alternatives.
Le textile est désormais au point et Jean-Louis Viovy dispose de la bourse de 150 000 euros, reçue via le très sélectif appel à projet « Proof of Concept »* du Conseil européen de la recherche (ERC) et de 18 mois pour poursuivre ses travaux et démontrer l’efficacité du procédé pour tester des traitements et sa faisabilité à une échelle industrielle. Il s’agit notamment de perfectionner les techniques dites de « microfluidique » nécessaire pour faire fonctionner un tel système et voir s’il permet effectivement de mesurer le développement, la stagnation, la régression des tumoroïdes en fonction des traitements appliqués. Jean-Louis Viovy peut compter pour cela sur la plateforme de microfluidique de l’Institut Pierre-Gilles de Gennes (IPGG)**, cofondée par l’Institut Curie, et sa directrice Catherine Villard pour les aspects biophysiques et technologiques, ainsi que sur le Dr Olivier Delattre et Didier Surdez, de l’Unité cancer, hétérogénéité, instabilité et plasticité du Centre de recherche de l’Institut Curie pour les aspects cliniques.
Cette bourse très sélective apporte une nouvelle fois la preuve de la grande performance des chercheurs de l’Institut Curie, puisque sur les neuf lauréats français sélectionnés sur cette édition d’appels à projet, deux sont remportés par des chercheurs travaillant au Centre de recherche de l’institut.
*Proof of Concept pour preuve du concept
**L’IPGG réunit une dizaine d’équipes de recherches rattachées à l’Institut Curie, à Chimie ParisTech, à l’Ecole Normale Supérieure et à l’ESPCI Paris, membres de l’université PSL.
Contact :
Jean-Louis-Viovy
jean-louis.viovy@curie.fr
article de Valérie Devillaine 29/01/2020 curie.fr