Par Dr. Dominique Rueff
Et, tout aussi certainement, vous connaissez les bases de ce régime : beaucoup de poisson, peu de viande rouge, une préférence marquée pour les aliments d’origine végétale…
Mais l’on oublie souvent que l’un des « ingrédients » de ce régime plus sain que les autres sort du strict cadre de l’alimentation : c’est le soleil. Il brille là-bas plus longtemps et plus généreusement qu’ici !
Le résultat ? Un apport naturel extrêmement riche en vitamines D.
Or, cet apport est déterminant… La vitamine D intervient dans l’absorption du calcium et du phosphore par les intestins, ainsi que dans leur réabsorption par les reins. Elle influence plus de 200 gènes, ce qui expliquerait son importance potentielle dans de nombreuses maladies.
Et c’est cette intervention capitale qui vient à nous manquer chaque année, en France, dès que nous rentrons dans l’automne. Pourquoi ? Parce que la vitamine D, apportée par l’alimentation, est avant tout synthétisée par l’organisme au niveau de la peau sous l’action des rayons solaires ou ultraviolets.
L’équation est simple : moins de soleil = moins de vitamine D !
En France, une grande partie de la population est déficiente et parfois à la limite de la carence. Y compris chez ceux qui s’exposent plus longtemps au soleil !
Je vous propose aujourd’hui de découvrir l’incroyable éventail des pouvoirs de cette précieuse vitamine… et comment en profiter sans avoir à déménager en Crète.
Quels sont les pouvoirs de la vitamine D ?
La vitamine D agit en stimulant l’absorption intestinale du calcium et sa fixation dans les os. Elle est principalement produite par le corps sous l’action des rayons ultraviolets UVB sur la peau. On la trouve également dans les poissons marins gras, mais, selon l’Académie de médecine, il faudrait manger 400 grammes de saumon par jour pour avoir un apport journalier optimal en vitamine D [1] !
Un déficit entraîne un rachitisme chez l’enfant et l’adolescent et une décalcification osseuse (ostéomalacie) chez l’adulte. Elle contribue également à l’ostéoporose chez la femme ménopausée et le sujet âgé. Elle pourrait également avoir d’autres effets, notamment dans la prévention de certaines maladies infectieuses ou auto-immunes ainsi que dans le diabète de type 1, mais des études sont encore nécessaires pour conforter ces effets, relève l’Académie.
Voici 14 cas dans lesquels des études ont prouvé le danger que présentait une carence en vitamine D, et à l’inverse les effets positifs d’une supplémentation.
1 – La vitamine D booste l’immunité
La vitamine D joue un rôle essentiel pour activer l’immunité, éviter les rhumes et la grippe et en diminuer la durée [2].
Elle accroît l’activité des macrophages (ces globules blancs qui « digèrent » les bactéries) et favorise la production de peptides anti-infectieux et de cytokines anti-inflammatoires.
Il existe une relation entre les variations saisonnières du statut en vitamine D d’une population et l’incidence et la gravité des pathologies infectieuses, en particulier respiratoires.
Les apports en vitamine D sont inversement corrélés à la fréquence des infections respiratoires hautes. Un apport de 1200 UI/j. (30 µg/jour) conduit à une réduction de 42 % de l’incidence de la grippe chez des écoliers japonais.
2 – La carence en vitamine D triple le risque cardiovasculaire
Les mêmes auteurs ajoutent à cela que cette vitamine joue un rôle vital chez les sujets âgés en réduisant le risque de décès, notamment par maladies cardiovasculaires.
3 – La carence en vitamine D favorise la sclérose en plaques
Pour la première fois, une étude à large échelle établit un lien entre le taux sanguin de vitamine D et le risque de sclérose en plaques. Cette étude a été menée au sein de l’armée américaine sur 257 membres du personnel.
Au total, les sujets dont les taux sériques se situaient dans la partie supérieure avaient un risque de développer une sclérose en plaques inférieur à 62 % [3]. L’apport de vitamine D ou l’exposition aux rayons solaires (UVB) retarde ou empêche l’expression de la maladie sur des modèles animaux de sclérose en plaques (SEP).
La sclérose en plaques, mais également d’autres maladies auto-immunes comme le diabète de type 1 ou la polyarthrite rhumatoïde sont plus fréquentes dans les pays éloignés de l’équateur et dans les groupes de personnes avec des apports en vitamine D faibles, surtout avant l’âge de 20 ans.
4 – Vitamine D et cancers
Y a-t-il un lien entre le statut en vitamine D et le cancer du sein ? Afin de répondre à cette question, une équipe canadienne [4] a étudié un groupe de 500 femmes porteuses d’une tumeur mammaire, qu’ils ont suivi sur plusieurs années.
Première surprise : au moment du diagnostic, plus d’un tiers des femmes incluses présentait une déficience en vitamine D, près de 40 % une insuffisance et 25 % seulement avaient un taux normal.
Seconde surprise : les femmes déficientes en vitamine D ont rechuté quasiment deux fois plus tôt que celles ayant un taux normal, et leur survie globale était réduite de 73 %.
Une autre étude [5] montre que le risque de cancer du sein serait diminué de 25 % pour les femmes ayant un taux sanguin de vitamine D élevé.
Une étude prospective sur 18 ans chez près de 15 000 hommes confirme qu’un taux suffisant de vitamine D est protecteur contre le cancer de la prostate. Les hommes ayant un récepteur de la vitamine D peu actif seraient plus à risque de présenter ce cancer s’ils sont, en plus, carencés.
Des taux bas sont également liés à une augmentation de la mortalité toutes causes confondues (+ 57 %) et de la mortalité cardiovasculaire (+ 41 %), selon une méta-analyse parue en juin 2014 dans le célèbre British Medical Journal (BMJ).
5 – Vitamine D et troubles cognitifs
Un travail britannique conduit chez les hommes de 40 à 79 ans montre que ceux qui ont de faibles taux de vitamine D échouent davantage à certains tests des fonctions cognitives. Des travaux complémentaires sont nécessaires pour voir si une supplémentation en permet de préserver les fonctions cognitives [6].
Une étude réalisée sur 382 personnes d’âge moyen de 75 ans et publiée dans le non moins respecté Journal of Internal Medicine (JAMA), en septembre 2015, démontre également que la vitamine D protège d’un déclin cognitif rapide.
6 – Vitamine D et maladie de Parkinson
Une étude finlandaise menée sur près de 30 ans a montré qu’un faible taux de vitamine D peut prédire le risque de survenue d’affection neurologique. Il se peut que la vitamine D se montre neuroprotectrice par le biais de mécanismes antioxydants, de régulation du calcium neuronal, d’une immunomodulation, d’une majoration de la conduction nerveuse ou bien encore d’une détoxification.
Une étude américaine de janvier 2014 [7] réalisée sur 266 personnes suggère que la vitamine D pourrait prévenir l’altération des fonctions cognitives chez les patients atteints de maladie de Parkinson.
7 – Vitamine D : un puissant antiviral !
Les infections rhinopharyngées sont connues pour se transmettre très volontiers lors des rassemblements humains. Mais pourquoi avec prédilection en automne-hiver ? Un élément de réponse est proposé par une équipe américaine : ces médecins ont eu l’idée de rechercher un lien entre le taux sanguin de vitamine D, en automne-hiver, et le risque respiratoire. Une étude en double-aveugle a été menée auprès de 198 adultes sains au cours des saisons froides 2009-2010. La corrélation se fait d’elle-même. Sur les 18 participants dont le taux de vitamine D s’est maintenu dans la fourchette haute, le taux d’infection virale a été de 3 cas. Chez les 180 autres, 45 % ont été atteints. Cerise sur le gâteau, les taux les plus élevés étaient associés à une affection plus courte [8].
8 – Les apports en vitamine D au secours de nombreuses souffrances
Dans une étude norvégienne [9] réalisée sur plus de 500 patients, les auteurs notent une corrélation entre un taux sérique bas de vitamine D et des maux de tête.
Une autre étude sur plus de 3000 hommes trouve des corrélations avec les douleurs chroniques.
Une étude chez les diabétiques révèle que la correction de la carence en vitamine D permet de réduire l’intensité des douleurs neuropathiques.
Une étude prospective sur plus de 290 femmes traitées par les médicaments antihormonaux dits « anti-aromatase » à la suite d’un cancer du sein, indique qu’une supplémentation corrigeant la carence a un effet antalgique.
9 – La vitamine D prévient le risque de chute chez les personnes âgées : conseillez-la à vos vieux parents !
La vitamine D ayant une action directe sur la force musculaire du fait de la présence de récepteurs spécifiques au niveau du muscle, il était logique d’évaluer son effet sur la prévention des chutes chez la personne âgée. Une étude américano-helvétique montre qu’aux doses de 700 à 1000 UI/j, elle réduit de 19 % le risque de chute.
10 – Cardiopathies sévères et déficience en vitamine D
D’après la présentation effectuée lors de la 63e édition du congrès scientifique annuel de l’American College of Cardiology, la carence en vitamine D constitue un facteur de risque indépendant de cardiopathie : des faibles taux de vitamine D étant associés à une occurrence accrue de coronaropathie plus sévère. Dans cette étude, la plus vaste du genre, visant à évaluer la relation entre le taux de vitamine D et la coronaropathie, des chercheurs italiens ont constaté une carence en vitamine D (< 20 ng/ml) chez 70,4 % des patients (N = 1484) soumis à une coronarographie [10].
11 – Une méta analyse [11] [12] confirme la corrélation entre taux faibles de vitamine D et états dépressifs
En conséquence, il semble bien que l’on puisse conseiller d’optimiser ses statuts en vitamine D dans le cadre de risques de dépression et en plus des traitements classiques de la dépression.
12 – Vitamine D et hypertension artérielle
Une équipe internationale a publié dans la prestigieuse revue Lancet, une méta-analyse [13] prenant en compte plus de 100 000 sujets : même en tenant compte des facteurs génétiques, le taux de vitamine D a un impact réel sur l’hypertension artérielle et plus spécifiquement la systolique (le chiffre du haut).
13 – Les carences en vitamine D suspectées d’augmenter l’asthme
Une étude [14] a démontré que les crises d’asthme étaient liées à une carence en vitamine D.
Pour parvenir à cette conclusion, ces scientifiques de l’université de Tel Aviv se sont appuyés sur les données d’un groupe de près de 308 000 Israéliens âgés de 22 à 50 ans. Leurs taux de vitamine D ont été mesurés durant 4 ans (entre 2008 et 2012).
« Statistiquement, il ressort que le risque de crise d’asthme chez les malades présentant une carence en vitamine D est de 25 % plus élevé que chez les autres », affirme le Dr Confino-Cohen, allergologue et principal auteur de l’étude. Mais pour lui, ce sont les rayons du soleil qui permettraient de réguler les réponses immunitaires, entravant ainsi l’emprise de l’asthme.
En conclusion, les auteurs de l’étude recommandent aux personnes souffrant d’asthme de faire mesurer leurs taux de vitamine D, et en cas de carence, de prendre des compléments. S’exposer de manière modérée au soleil pourrait réduire les épisodes graves d’asthme.
14 – Lutter contre la puberté précoce
La puberté précoce est un nouveau problème de santé que l’on voit apparaître et qui serait liée à l’usage des pesticides. Une étude récente [15] montrerait que l’administration de vitamine D soit un des éléments susceptibles de contribuer à normaliser ce problème.
Sept signes pouvant vous alerter sur un risque de déficience en vitamine D [16] :
1 – Vos os sont douloureux
« Surtout en hiver, les adultes [déficients en vitamines] ressentent plus de douleurs au niveau des muscles et des os », indique Michael Holick, et les articulations sont un peu plus raides au réveil.
2 – Vous êtes déprimé(e)
Selon Michael Holick, la vitamine D augmenterait les taux de sérotonine, un neurotransmetteur qui aide à se sentir mieux. Dans le cadre d’une étude datant de 1998, des personnes saines à qui l’on a donné des suppléments de vitamine D en hiver ont fait état d’un meilleur état d’esprit que les personnes n’ayant pas reçu de vitamine D.
3 – Vous avez au moins 50 ans
Avec l’âge, la peau ne produit plus autant de vitamine D et les reins sont moins efficaces pour convertir cette vitamine en une forme utilisable par le corps, selon la Société américaine contre le cancer. Par ailleurs, les personnes âgées ont moins tendance à s’exposer convenablement au soleil.
4 – Vous êtes en surpoids ou obèse
Les personnes en surpoids ne connaissent aucun changement au niveau de la vitamine D, mais une concentration plus élevée de graisse dans le sang a une influence sur les taux de vitamine D dans le sang [17].
5 – Votre peau est plus mate
Les études ont démontré des différences démographiques claires [18] pour les insuffisances et déficiences en vitamines D. « Votre peau est une crème solaire naturelle », indique Michael Holick. Une crème solaire avec un indice 30 réduit la capacité de la peau à produire de la vitamine D de 97 %, indique-t-il. Une personne ayant la peau très sombre a besoin d’être exposée au soleil 10 fois plus qu’une personne à la peau pâle pour produire le même taux de vitamine D.
6 – Vous transpirez beaucoup de la tête
Il y a encore un siècle, les médecins demandaient aux jeunes mères si leur bébé transpirait beaucoup de la tête. C’est l’un des premiers et des plus classique signes de déficience en vitamine D.
7 – Vous avez des problèmes intestinaux.
Les personnes atteintes de maladies cœliaques, inflammatoires ou maladie de Crohn sont plus exposées à une déficience en vitamine D car les maladies gastro-intestinales peuvent affecter l’absorption du gras.
Comment améliorer son taux de vitamine D ?
La carence est définie par un taux de 25-hydroxyvitamine D, dans le plasma, inférieur à 75 nano mol/l (30 nano grammes/ml). Avec cette limite, la carence concernerait plus d’un milliard de personnes sur terre et plus de la moitié des femmes ménopausées.
Ce sont en priorité les compléments en vitamine D, par voie orale, qui sont conseillés par l’Académie de médecine [19]. Il n’est pas question de seulement inciter les gens à prolonger leur exposition au soleil ou aux UV artificiels, qui eux présentent un risque accru dans la survenue des cancers de la peau.
Officiellement, les apports nutritionnels conseillés en France (ANC) sont de 200 UI/J (5 µg) avant 65 ans et le double ou le triple après 65 ans.
Mais de nombreux experts recommandent aujourd’hui des doses 5 à 20 fois plus élevées, soit des apports de 1000 à 4000 UI/jour. Selon ces experts, cet apport, sans danger, permet de maintenir un taux dans la fourchette des valeurs optimales. Le suivi par les analyses de laboratoire semble indispensable car, à forte dose prolongée, les excès de supplémentation en vitamine D restent à éviter, d’autant que la vitamine D se stocke dans les graisses. Des apports trop importants peuvent être néfastes à la croissance, entraîner la calcification des tissus mous (reins, parois vasculaire…), l’hypercalcémie (taux sanguin de calcium élevés).
Voici les normes officielles pour interpréter les résultats [20] :
- Carence : 25 (0H) D < à 25 nanomoles/l (10 ng/ml)
- Déficit : entre 25 et 75 nanomoles/l (10-30 ng/ml)
- Normalité : entre 75 et 250 nanomoles/l (30 à 100 ng/ml)
Le dosage sanguin (vitamine OH D2/D3 endogène) n’est plus remboursable ni recommandé en France depuis un décret d’aout 2014, en dehors de l’exploration du risque osseux, car :
- La relation de cause à effets avec d’autres pathologies que celles liées à la structure osseuse reste à démontrer, du moins pour les pouvoirs officiels
- Consommer (sans dosage) de la vitamine D jusqu’à 10.000 UI/jour serait sans danger.
La méfiance officielle n’est ni mon sentiment personnel ni celui de MG France [21], un important syndicat de médecins généralistes. Pour obtenir avec une supplémentation journalière un taux compris entre 40 et 50 nanogrammes/ml, il faut, en moyenne, pendant un mois :
- 2 à 3000 UI par jour de vitamine D, soit 10 à 15 gouttes de calcifédiol (vitamine D3 hydroxylée) DEDROGYL® (seulement sur ordonnance), ou 7 à 10 gouttes de colécalciférol (vitamine D3), ZYMAD® gouttes (sans ordonnance), si le taux initial est de 22 à 30 ng/ml
- 5000 UI par jour si le taux était inférieur à 22 ng/ml
À l’inverse, il faut savoir que certains médicaments altèrent le métabolisme de la vitamine D (barbituriques, médicaments antilipémiants, cortisone).
Mais la zone de toxicité potentielle reste très éloignée des valeurs optimales (entre 30 et 80 ng/ml) et concerne des taux supérieurs à 150 ng/ml.
En conclusion, il faut rappeler que la vitamine D est en grande partie synthétisée par la peau sous l’action des rayons du soleil qui en est la clé, à condition qu’elle ne soit pas protégée. Si vous attrapez facilement des coups de soleil, au bout de 30 minutes sans crème solaire, sortez 10 à 15 minutes, mettez ensuite votre protection solaire. Exposez vos bras, jambes, abdomen et dos si vous le pouvez, pour un maximum d’apport en vitamine D.
Le reste est en théorie apporté par l’alimentation (poisson gras, œufs, foie de morue…), d’où l’importance des apports alimentaires en vitamine D : poissons gras en préférant les petits poissons pour minimiser le risque de pollution par les métaux lourds (sardines, anchois), les œufs (et mieux encore s’ils proviennent de poules nourries aux graines de lin), le foie de veau biologique.
Mais le constat actuel de dosages sanguins à la limite de la déficience démontre bien que la supplémentation nutritionnelle, surveillée biologiquement, reste pour beaucoup le seul moyen d’optimiser son taux de vitamine D.
Dr Rueff