Illustration du récepteur de la membrane cellulaire CAR-T, un lymphocyte T produit à partir des cellules du patient et génétiquement modifié pour reconnaître les cellules tumorales et les détruire. JACOPIN/BSIP
Deux immunologistes, Eric Vivier et Marc Daëron, expliquent comment l’arrivée de molécules spectaculairement efficaces bouleverse la cancérologie
Anticorps monoclonaux anti-PD-1, cellules CAR-T… Depuis quelques années, le public et les principaux intéressés, les patients atteints de cancers, apprennent à se familiariser avec une nouvelle classe de traitements antitumoraux, les immunothérapies.
Le dernier prix Nobel de médecine a d’ailleurs été décerné à deux pionniers du domaine : l’Américain James Allison et le Japonais Tasuku Honjo. Leurs travaux ont conduit à la mise au point de médicaments, dits inhibiteurs de points de contrôle immunitaire, qui ont changé le destin de malades jusque-là considérés comme incurables.
Patients et familles ne sont pas les seuls dont l’existence ait été bouleversée par l’arrivée de ces médicaments agissant d’une façon ou d’une autre sur le système immunitaire. Il en va aussi pour « le quotidien des soignants, les axes de travail des chercheurs et les orientations de l’industrie pharmaceutique », soulignent les immunologistes Eric Vivier et Marc Daëron dans L’Immunothérapie des cancers. Histoire d’une révolution médicale.
Effets impressionnants
Belle et ambitieuse idée que de consacrer tout un livre à ce sujet foisonnant mais complexe. Pas à pas, les deux chercheurs racontent la saga de l’immunothérapie anticancer, qui a commencé à la fin du XIXe siècle et occasionné nombre de désillusions avant les résultats spectaculaires obtenus ces dernières années.
Malgré un ensemble de schémas, la partie la plus fondamentale de l’ouvrage (qui décrit les différentes cellules immunitaires, leurs récepteurs, les coopérations entre les systèmes…) semblera peut-être un peu aride à bien des lecteurs. Qu’ils n’hésitent pas à sauter des pages. Il serait dommage de caler avant le récit des découvertes les plus récentes et la dernière section, qui aborde les enjeux médicaux et sociétaux de ces traitements.
Les chiffres qu’avancent les auteurs donnent le vertige. « En 2018, plus de 3 000 essais cliniques incluent 600 000 patients. Du jamais-vu sur une période aussi courte », insistent-ils. L’intérêt pour le domaine de l’immuno-oncologie est d’une telle ampleur et si soudain qu’il devient compliqué d’inclure des patients dans des études cliniques pour certaines indications-phares. Autre chiffre significatif : fin 2017 étaient recensés près de 1 000 traitements ou « candidats traitements » relevant de l’immunothérapie, ciblant plus de 270 molécules.
En finissant la lecture, difficile de ne pas être conquis par l’enthousiasme des auteurs : l’immunothérapie des cancers est bien une révolution, et leur livre, un plaidoyer pour la recherche fondamentale. « Faire de la recherche, assurent-ils, c’est partir pour les Indes et découvrir l’Australie. »